Près de quarante personnes étaient présentes le jeudi 7 novembre 2019, à Agrocampus Ouest à Angers, dont une partie d'étudiants.
Les professionnels du paysage et de l’urbanisme du Grand Ouest se sont associés pour organiser un temps de rencontre-débat qui s’est déroulé en trois temps, traitant de la place de la Nature en Ville aussi bien en milieu urbain que rural, à l’appui de cas concrets dans l’Ouest, faisant ressortir la notion de densité, de pollution, d’allergies, de santé publique physique et mentale, de ville biophilique, de trames vertes, bleues, brunes, et de corridors écologiques.
Après une introduction par Amélie Decaux, membre de l’AUGO, Vincent Bouvier, enseignant-chercheur à Agrocampus, nous a fait un retour sur le programme de recherche intitulé «Urbanisme réversible en Anjou» mené depuis 2 ans avec des acteurs de la société civile, permettant de repenser les formes d’occupation des sols
http://www.environnement-urbanisme.certu.developpement-durable.gouv.fr/l-urbanisme-reversible-un-outil-d-amenagement-a177.html
Journée d’étude et d’échanges sur le thème de l’urbanisme réversible en juin 2018 :
https://paysages-territoires-transitions.cerema.fr/IMG/pdf/synthese_urbanisme_reversible_vf.pdf
Il nous invité à consulter à cette occasion le rapport sur l'artificialisation de 2017 réalisé par l'INRA.
https://artificialisation.biodiversitetousvivants.fr/bibliographie/artificialisation-sols-determinants-impacts-leviers
Ainsi qu’une thèse de doctorat ADEME «De la réversibilité des aménagements à la flexibilité des territoires : contribution juridique à la réversibilité» Chloé Bruneau.
Vincent Bouvier a évoqué plusieurs pistes de travail : des zones d'"urbanisation réversible" au sein de Plans Locaux d'Urbanisme, le travail sur des fondations démontables (technopieux), les logiques de cycle de vie / recyclage urbain. Il évoque la posture de Gilles Clément sur la prise en compte de la nature en ville, basée sur "la préséance du vivant" dans tous les choix opérés en matière d'aménagement.
Céline Levrard, Directrice du CAUE de la Sarthe et Présidente de la FFP Grand Ouest, et Sylvie Pigot, paysagiste conceptrice ont présenté une étude réalisée sur la ville de La Ferté Bernard, portant sur le maillage des arbres dans une ville rurale, et l’implication de la population. Un travail fin de diagnostic a mis en avant l'intérêt de préserver les grands sujets existants. Le réflexe est trop souvent d'adopter une logique de replantation d'arbres lors de nouveaux aménagements, sans faire l'effort de travailler autour des arbres existants. Cette approche nous invite à davantage d'humilité dans notre approche et un plus grand respect du vivant, passant par de la pédagogie.
Céline et Sylvie nous ont alerté sur les nombreuses maltraitances subies par les arbres en milieu urbain (étouffement par le bitume, stationnement automobile, ...). Les échanges dans le public ont ensuite abordé les concepts de trame brune, verte et grise, mettant en connexion les espaces de plein sol dans le prolongement des concepts de TVB. Les participants s'accordent sur la nécessité d'approches empiriques, sans choix préconçus, laissant la nature s'adapter. Il s'agit de tester, voir ce qui se pérennise, accepter les échecs. D'autres approches sont évoquées : méthode Myawaki, absence de vision utilitaire de la nature (la nature pour elle-même) ; ainsi que certaines expérimentations (Little Big Forest à Nantes, Jardin forêt comestible, Permis de planter à Tours le long des rues…).
La question culturelle semble être véritablement centrale, interrogeant notre rapport à la nature. Cela appelle à des postures plus humbles, hybrides entre urbain et nature, à l'opposé de la nature objet et simplement paysagère.
Timothée Naux, architecte de Agence TETRAC et Thomas Raimbault, ingénieur-paysagiste de l'agence Guillaume Sevin Paysages nous ont présenté le projet Climax projeté sur un ilot en renouvellement urbain à Angers, lauréat de Imagine Angers, l’API lancé par la ville d'Angers en 2017. L'ambition porte sur la réalisation d'un programme associant logements, commerces, ferme urbaine, dans un esprit low tech. Le parti retenu vise à laisser la nature prendre pleinement sa place. L'équipe souhaitait éviter l'écueil consistant à produire un projet puis à l'habiller par des éléments de nature. L'approche a au contraire pris un contrepied en cherchant à créer un biotope favorable au développement d'une végétation locale, inspirée des falaises schisteuses angevines, permettant une véritable diversité génétique. L'architecture devient colonisable par la végétation. Cette expérimentation a nécessité la résolution de nombreuses difficultés techniques pour garder les objectifs écologiques initialement fixés : entretien, perméabilités,...
Le débat a souligné combien les besoins de la planification urbaine et ceux des espaces naturels sont parfois contradictoires, avec les conflits d’usages apparus notamment au cours du XXe siècle avec le développement de la voiture.
Il a aussi permis de mettre en exergue l’importance de privilégier le bioclimatisme dans la planification urbaine, et pour deux principes majeurs : d’une part pour une redéfinition des emprises d'espaces publics, quitte à mixer les usages de façon réfléchie ; d’autre part de toujours identifier les exigences de l’espace naturel en amont des projets, rejoignant la devise de Gilles Clément.